lundi 19 septembre 2011

Neruda (lambeaux de poésie...)







Corps de femme, blanches collines, cuisses blanches,
tu ressembles au monde dans ton attitude d'abandon.


Mon corps de laboureur sauvage te creuse 
et fait jaillir le fils du fond de la terre.


Je fus seul comme un tunnel. Les oiseaux me fuyaient, 
et en moi la nuit pénétrait de son invasion puissante.
Pour me survivre je t'ai forgée comme une arme,
comme une flèche à mon arc, comme une pierre à ma fronde.


Mais l'heure de la vengeance tombe à pic, et je t'aime.


Corps de peau, de mousse, de lait avide et ferme.


Ah les vases de la poitrine! Ah les yeux de l'absence!
Ah les roses du pubis! Ah la voix lente et triste!
Corps de femme mienne, je persisterai en ta grâce.


Ma soif, mon désir sans bornes, mon chemin indécis!


Lits de rivières obscurs où la soif éternelle continue,
et la fatigue continue, et la douleur infinie.


***


Vent qui dérobe en vol rapide les feuilles mortes
et dévie les flèches palpitantes des oiseaux.


***


Je veux faire  avec toi
ce que le printemps fait avec les cerisiers.


***


Ton corps entier  possède
la coupe ou la douceur qui me sont destinés.


Quand je lève la main 
je trouve en chaque endroit une colombe
qui me cherchait,
comme si, mon amour, d'argile on t'avait faite
pour mes mains de potier.


Tes genoux, tes seins
et tes hanches
me manquent comme au creux
d'une terre assoiffée
d'où l'on a détaché
une forme, et ensemble
nous sommes un tout comme l'est un fleuve
ou comme le sable.


***


Aujourd'hui nos corps ont grandi, grandi,
ils sont arrivés jusqu'au bout du monde
et ils ont roulé, fusionné:


goutte unique 


de cire ou météore.


Entre nous - toi et moi - une porte nouvelle
s'est ouverte où quelqu'un, encore sans visage,
nous attendait.







Illustration: trouvée ici.

3 commentaires:

  1. ces mots qui touchent,
    c'est comme un souvenir de deux mains, comme un retour en avant.
    c'est beau.
    Merci

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  2. Oui Peau d'âme, ces mots touchent comme des mains amoureuses...c'est un rappel de l'amour à lui-même.

    Merci à toi pour ton passage, chère passante... :)

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