Illustration de Brian Froud |
L'ombre a émergé alors que je sortais de l'enfance. Je l'ai vraiment sentie lors de la première menstruation. Je me souviens surtout de cette odeur nouvelle, inconnue, ce sang qui ne venait pas d'une blessure et qui pourtant, annonçait la mort de quelque chose. La mort de la fillette solaire et la naissance d'une adolescente désenchantée, submergée par l'ombre vorace et refoulée de toute une lignée de femmes.
Elle est venue avec l'attrait du noir, des poètes maudits et des contes macabres d'Edgar Allan Poe.
Le monde sembla tout entier recouvert par l'ombre. Il devint menaçant, lourd d'angoisses, peuplé de spectres et chaque matin était un nouveau défi à relever. Vivre en portant le deuil de soi. Sans personne à qui parler. L'ombre faisait trop peur à mes parents pour qu'ils veuillent bien l'entendre.
Ils sentaient bien que j'étais happée par cette force puissante, mortifère, mais la seule réaction était l'indifférence ou le dénie. Je me souviens précisément de cet exemplaire des Fleurs du mal que ma mère, dans un accès de rage, balança à la poubelle et du sentiment effroyable qui m'envahit alors. L'écriture me servit d'exutoire dès l'âge de treize ans permettant à ce monde pleins de ténèbres qui m'habitait de trouver sa place dans ma conscience.
L'ombre devint alors une compagne familière; je dirai même qu'elle joua dans ma vie un rôle initiatique et que, jusqu'à ce jour, elle veille sans ciller.
Le mot important dans tout ça, c'est "cycle".
RépondreSupprimerCycle de la lune, cycle menstruel...l'adolescence nous plonge dans les mystères du cycle féminin, qui est un aller et retour constant entre lumière, rayonnement (lune pleine) et noirceur, obscurité (lune noire)...en passant par toutes les phases intermédiaires (croissants de lune).
Il y a un auteur que j'ai découvert depuis peu qui explique très bien cela, c'est Miranda Gray. Tu connais ?