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Vassilissa commença à remercier la Yaga, mais la poupée se mit à s'agiter dans sa poche et Vassilissa se rendit compte qu'elle devait prendre le crâne et s'en aller. Elle courut jusque chez elle à travers la forêt obscure, suivant les méandres du chemin selon les indications de la poupée.
Vassilissa traversait la forêt, portant le crâne avec le feu qui jaillissait des trous à l'endroit de ses oreilles, de ses yeux, de son nez et de sa bouche. Soudain, elle eut peur de son poids et de sa lumière surnaturelle et eut envie de le jeter au loin.
Mais le crâne lui adressa la parole. Il lui enjoignit de se calmer et de continuer à marcher vers la demeure de sa belle-mère et de ses filles. Ce qu'elle fit.*
Après le travail des profondeurs, vient le moment de l'ascension, le retour au monde comme une nouvelle naissance. Il est étrange d'employer ce terme d'ascension pour exprimer un retour aux réalités de ce monde généralement employé pour décrire l'élévation de la conscience vers les hautes sphères divines...
Il s'agit pourtant d'un point essentiel de toute voie et je le mets en parallèle avec la symbolique de l'Ascension du Christ. Il est commun de considérer la voie spirituelle comme un chemin conduisant à se libérer définitivement de ce monde.
Dans le conte de Vassilissa, souvenez-vous, Baba Yaga presse la jeune héroïne du conte à repartir, à rentrer chez elle avec son nouveau Soi symbolisé par le crâne flamboyant (chakra couronne...). Elle la pousse à ne pas s'attarder dans ce monde sous-terrain qui est aussi le creuset de sa part divine.
Il s'agit là d'un piège spirituel très subtil: s'attarder dans l'illumination qui est, disons-le sans mentir, un lieu bien plus confortable que les vicissitudes terrestres. Quand nous vivons la fusion, l'unité du Soi, il est très tentant de ne plus "revenir", d'alimenter de façon à peine perceptible par le mental (qu'à force de diaboliser , on alimente...) ce détachement vis-à vis du monde.
Or, je ne crois pas que le Christ soit venu en ce monde pour en suite s'en retirer. Il est venu au contraire s'offrir dans sa totalité. Croire en une séparation entre le royaume des Cieux et le royaume terrestre est le propre même de la dualité. Cette idée d'Ascension au Ciel du Christ peut s'apparenter au retour de Vassilissa armée de son Soi flamboyant vers le monde d'en haut, c'est à dire le monde extérieur (le monde ontologique des contes étant un monde renversé ce qui est en haut est en bas et inversement. De nombreux mythes et contes évoquent cet inversement des valeurs).
Sans doutes s'agit-il de la véritable naissance qu'évoque Jésus à Nicodème quand il lui parle de "naître d'en haut". Le Royaume des Cieux où l'on établit communément la demeure de Dieu, se situe en réalité dans nos profondeurs et c'est là qu'il nous faut aller chercher si nous voulons accéder à la Vie réelle, si nous voulons réellement incarner le divin reconnu au fond de soi. La science ne dit-elle pas que nos cellules sont composées de la même matière originelle que les étoiles? Dieu est semble-t-il encodé dans chaque particule de notre être; c'est donc en nous, dans l'espace perceptible de notre champ de conscience que nous devons Le chercher et Le trouver.
Le crâne flamboyant contient le Soi, c'est à dire la lumière divine obtenue après une remontée jusqu'au chakra Couronne symbolisé dans l'arbre de vie de la Kabbale par la sephiroth Kether. Mais si l'Arbre de Vie propose justement une remontée de l'initié vers les hautes sphères, il propose aussi un retour dans le sens inverse pour amener la lumière recueillie en kether vers le royaume dit Malkuth (la sphère matérielle et terrestre). C'est tout le cheminement de l'homme suivant la Voie du milieu.
Quand on observe l'arcane de la Tempérance, nous voyons bien comment l'énergie d'en haut est reliée à celle d'en bas, mais cela exige une transmutation de la matière vivifiée par l'Esprit (ou étymologiquement Pneuma=Souffle). C'est ce souffle justement qui doit franchir les étapes de l'arbre des Séphiroth, dépasser les blocages inhérents à chaque passage (ou portes) afin d'habiter pleinement son Arbre, ou plus directement habiter son Corps dont l'Arbre est l'image archétypale (Annick de Souzenelle). Mais la tâche la plus ardue n'est sans doute pas celle de monter vers l'Aïn Soph Aur (Lumière infinie) qui nous lance un appel déchirant depuis nos profondeurs au plus loin que remonte l'exil, mais bien celle d'accepter d'en être momentanément privé le temps de l'incarnation afin d'accomplir la descente de cette lumière dans les sphères opaques de la matière. C'est ce que symbolise sans doute les ailes couleur chair de l'ange de Tempérance: le Souffle allié à la matière.
La véritable spiritualité ne se mesure pas seulement à la façon dont vous savez dissoudre l'ego (même si au départ c'est un travail utile) mais à la façon dont à travers l'ego (qui ne peut complètement disparaître tant que les corps est là...), ou la persona, vous exprimer la spiritualité. Elle se mesure à la façon dont vous allez réaliser chaque énergie rencontrée sur votre chemin dans le concret, la matière.
C'est une façon de soumettre la matière aux lois nouvellement intégrées de l'Esprit. Et non le contraire (comme le pratique le magicien qui soumet les lois de l'Esprit à des désirs purement matériels...). C'est ce qu'est en train d'accomplir la jeune Vassilissa; elle se rend bien compte à quel point la tâche est vertigineuse et à quel point elle n'y a pas été préparée (nous marchons à tâtons guidé seulement par l’intuition et la Connaissance peu à peu acquise).
Soudain, elle eut peur de son poids et de sa lumière surnaturelle et eut envie de le jeter au loin.*
En effet, l'enjeu n'est plus le même; nous devenons responsable de ce que nous allons exprimer de cette connaissance, de la façon dont nous allons la transmettre et l'incarner.
Se tenir à quatre pattes que je reprends en titre signifie bien sûr selon l'expression de Pinkola Estés retrouver ses instincts perdus, sa nature véritable et sauvage. Mais cela signifie aussi, à ma façon, se tenir verticalement au coeur même de la matière (le quatre ou le symbole du carré). Vous notez que le 14 de la Tempérance est le Un allié au 4, le carré dans le cercle...
Se tenir à quatre pattes, c'est aussi faire confiance en son flair, en sa guidance spirituelle; c'est être parfaitement stable et proche de ses racines. C'est pouvoir se glisser dans les sous-bois épineux sans perdre l'équilibre.
Dans cette vidéo, Arouna Lipschitz, explique comment après avoir porté dix ans la robe orange (tradition hindouiste), elle dut retourner au monde et réaliser sa spiritualité de façon plus concrète...
Il s'agit pourtant d'un point essentiel de toute voie et je le mets en parallèle avec la symbolique de l'Ascension du Christ. Il est commun de considérer la voie spirituelle comme un chemin conduisant à se libérer définitivement de ce monde.
Dans le conte de Vassilissa, souvenez-vous, Baba Yaga presse la jeune héroïne du conte à repartir, à rentrer chez elle avec son nouveau Soi symbolisé par le crâne flamboyant (chakra couronne...). Elle la pousse à ne pas s'attarder dans ce monde sous-terrain qui est aussi le creuset de sa part divine.
Il s'agit là d'un piège spirituel très subtil: s'attarder dans l'illumination qui est, disons-le sans mentir, un lieu bien plus confortable que les vicissitudes terrestres. Quand nous vivons la fusion, l'unité du Soi, il est très tentant de ne plus "revenir", d'alimenter de façon à peine perceptible par le mental (qu'à force de diaboliser , on alimente...) ce détachement vis-à vis du monde.
Or, je ne crois pas que le Christ soit venu en ce monde pour en suite s'en retirer. Il est venu au contraire s'offrir dans sa totalité. Croire en une séparation entre le royaume des Cieux et le royaume terrestre est le propre même de la dualité. Cette idée d'Ascension au Ciel du Christ peut s'apparenter au retour de Vassilissa armée de son Soi flamboyant vers le monde d'en haut, c'est à dire le monde extérieur (le monde ontologique des contes étant un monde renversé ce qui est en haut est en bas et inversement. De nombreux mythes et contes évoquent cet inversement des valeurs).
Sans doutes s'agit-il de la véritable naissance qu'évoque Jésus à Nicodème quand il lui parle de "naître d'en haut". Le Royaume des Cieux où l'on établit communément la demeure de Dieu, se situe en réalité dans nos profondeurs et c'est là qu'il nous faut aller chercher si nous voulons accéder à la Vie réelle, si nous voulons réellement incarner le divin reconnu au fond de soi. La science ne dit-elle pas que nos cellules sont composées de la même matière originelle que les étoiles? Dieu est semble-t-il encodé dans chaque particule de notre être; c'est donc en nous, dans l'espace perceptible de notre champ de conscience que nous devons Le chercher et Le trouver.
Le crâne flamboyant contient le Soi, c'est à dire la lumière divine obtenue après une remontée jusqu'au chakra Couronne symbolisé dans l'arbre de vie de la Kabbale par la sephiroth Kether. Mais si l'Arbre de Vie propose justement une remontée de l'initié vers les hautes sphères, il propose aussi un retour dans le sens inverse pour amener la lumière recueillie en kether vers le royaume dit Malkuth (la sphère matérielle et terrestre). C'est tout le cheminement de l'homme suivant la Voie du milieu.
Quand on observe l'arcane de la Tempérance, nous voyons bien comment l'énergie d'en haut est reliée à celle d'en bas, mais cela exige une transmutation de la matière vivifiée par l'Esprit (ou étymologiquement Pneuma=Souffle). C'est ce souffle justement qui doit franchir les étapes de l'arbre des Séphiroth, dépasser les blocages inhérents à chaque passage (ou portes) afin d'habiter pleinement son Arbre, ou plus directement habiter son Corps dont l'Arbre est l'image archétypale (Annick de Souzenelle). Mais la tâche la plus ardue n'est sans doute pas celle de monter vers l'Aïn Soph Aur (Lumière infinie) qui nous lance un appel déchirant depuis nos profondeurs au plus loin que remonte l'exil, mais bien celle d'accepter d'en être momentanément privé le temps de l'incarnation afin d'accomplir la descente de cette lumière dans les sphères opaques de la matière. C'est ce que symbolise sans doute les ailes couleur chair de l'ange de Tempérance: le Souffle allié à la matière.
La véritable spiritualité ne se mesure pas seulement à la façon dont vous savez dissoudre l'ego (même si au départ c'est un travail utile) mais à la façon dont à travers l'ego (qui ne peut complètement disparaître tant que les corps est là...), ou la persona, vous exprimer la spiritualité. Elle se mesure à la façon dont vous allez réaliser chaque énergie rencontrée sur votre chemin dans le concret, la matière.
C'est une façon de soumettre la matière aux lois nouvellement intégrées de l'Esprit. Et non le contraire (comme le pratique le magicien qui soumet les lois de l'Esprit à des désirs purement matériels...). C'est ce qu'est en train d'accomplir la jeune Vassilissa; elle se rend bien compte à quel point la tâche est vertigineuse et à quel point elle n'y a pas été préparée (nous marchons à tâtons guidé seulement par l’intuition et la Connaissance peu à peu acquise).
Soudain, elle eut peur de son poids et de sa lumière surnaturelle et eut envie de le jeter au loin.*
En effet, l'enjeu n'est plus le même; nous devenons responsable de ce que nous allons exprimer de cette connaissance, de la façon dont nous allons la transmettre et l'incarner.
Se tenir à quatre pattes que je reprends en titre signifie bien sûr selon l'expression de Pinkola Estés retrouver ses instincts perdus, sa nature véritable et sauvage. Mais cela signifie aussi, à ma façon, se tenir verticalement au coeur même de la matière (le quatre ou le symbole du carré). Vous notez que le 14 de la Tempérance est le Un allié au 4, le carré dans le cercle...
L'homme de Vitruve - L. de Vinci |
Se tenir à quatre pattes, c'est aussi faire confiance en son flair, en sa guidance spirituelle; c'est être parfaitement stable et proche de ses racines. C'est pouvoir se glisser dans les sous-bois épineux sans perdre l'équilibre.
Dans cette vidéo, Arouna Lipschitz, explique comment après avoir porté dix ans la robe orange (tradition hindouiste), elle dut retourner au monde et réaliser sa spiritualité de façon plus concrète...
* Extraits du conte la Belle Vassilissa selon Clarissa Pinkola Estés dans Femmes qui courent avec les loups.
" Si tu veux, tu le pourras.
RépondreSupprimerFils de l'homme, regarde !
Contemple la lumière de la présence qui réside dans tout l'existant !
Contemple la force joyeuse de la vie des mondes d'en haut !
Vois comment elle descend et imprègne toute parcelle de vie que tu perçois avec tes yeux de chair et tes yeux de l'esprit.
Contemple les merveilles de la création et le Source de tout vivant qui rythme chaque créature.
Apprends à te connaître.
Apprends à connaître le monde, ton monde.
Découvre la logique de ton coeur et les sentiments de ta raison !
Ressens les vibrations de la Source de la vie qui est au plus profond de toi et au-dessus de toi et tout autour de toi.
L'amour qui brûle en toi, fais-le monter vers sa racine puissante, étends-le à toute l'âme de tous les mondes.
Regarde les lumières...
Regarde à l'intérieur des lumières...
Monte et monte
Car tu possèdes une force puisante.
Tu as des ailes de vent, de nobles ailes d'aigle...
Ne les renie pas de peur qu'elles te renient.
Recherche-les et immédiatement elles te trouveront... "
(Baal Haorot, Le Maître des lumières : Orot Haqodèch, I, 64)
Merci pour ce très bel extrait (toujours finement trouvé!) et pour votre "initiation" qui a germé peu à peu en moi...c'est un peu grâce à vous que j'ai mûri cette idée du souffle dans les Sephiroth... :)
SupprimerBonjour Nout,
RépondreSupprimerIl est à mon avis, en effet, essentiel de redescendre dans le monde. Il est bien trop facile d'aimer l'absolu et de maudire le monde lorsque nous ne faisons rien pour l'améliorer.
Bonjour Kevin,
SupprimerL'amélioration est un approfondissement de nous-même qui porte inévitablement ses fruits dans notre rapport au monde.
Il ne faut pas perdre de vue que l'absolu est à la base du moindre objet que nous voyons, touchons, sentons etc. Il n'est jamais séparé de nous.
Bien à vous
Nout